EDWARD BULWER, LORD LYTTON.

LA RACE FUTURE.

PRÉFACE PAR

RAOUL FRARY.

PARIS

E. DENTU, ÉDITEUR

LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ DES GENS DE LETTRES

3, PLACE DE VALOIS, PALAIS-ROYAL

1888

DÉDIÉ À MAX MÜLLER EN TÉMOIGNAGE DE RESPECT ET D'ADMIRATION.


PRÉFACE.

Le livre que nous avons sous les yeux estbien un roman, mais ce n'est pas un romancomme les autres, car l'auteur s'est proposéde nous raconter non ce qui aurait pu arriverhier, ou autrefois, mais ce qui pourraitbien arriver dans quelques siècles. Les mœursqu'il dépeint ne sont pas les nôtres, ni cellesde nos ancêtres, mais celles de nos descendants.Il imagine bien une petite fable à laJules Verne, et feint de supposer que la«Race future» existe dès maintenant sousterre et n'attend, pour paraître à la lumièredu soleil et pour nous exterminer, que l'heureoù elle trouvera son habitation actuelle tropétroite. Mais cet artifice de narration netrompe personne, et il est évident queBulwer Lytton a voulu nous donner une idéede la façon de vivre et de penser de nosarrière-neveux.

C'est là une ambition légitime, quoiquel'entreprise soit singulièrement hardie. Il estpermis de chercher à deviner ce que l'avenirréserve à notre espèce. On connaît le cheminqu'elle a parcouru; on peut dire où elle va.Sans doute on risque fort de se tromper,mais un romancier ne répond pas de l'exactitudede ses tableaux et de ses récits; on nelui demande qu'un peu de vraisemblance.Quelquefois même on est moins exigeant etl'on se contente d'être amusé. Les Voyagesde Gulliver manquent absolument de vraisemblance,ce qui ne les empêche pas d'êtreun chef-d'œuvre souvent imité, jamais égalé.Il est vrai que les fictions de Swift ne sontque des vérités déguisées et grossies, et qu'ila écrit sous une forme divertissante la plusamère satire qu'on ait jamais faite d'unpeuple, d'un siècle, et même du genrehumain.

L'auteur de la «Race future» a dû penserà son illustre devancier, car son héros est,chez les hommes du vingt-cinquième ou dutrentième siècle, ce que Gulliver lui-mêmeest chez les chevaux du pays des Houyhnms,le représentant d'une civilisation inférieure,un barbare ignorant et corrompu en excursionchez les sages. Il y a seulement cettedifférence que les chevaux de Swift ne sontque vertueux et heureux, tandis que les«Vril-ya» de Bulwer sont, en outre, fortsavants. La vertu et le bonheur ne nousdonneraient plus l'idée d'une supérioritécomplète si l'on n'y joignait une grandepuissance industrielle fondée sur une connaissanceapprofondie des secrets de lanature. Le monde a marché, depuis le tempsde la reine Anne, et on ne se moque plusdes émules de Newton; c'est au contrairesur eux que l'on compte pour changer la facedes choses.

Mais il est bien malaisé d'imaginer deshommes infiniment plus savants que nous:les grandes découvertes ne se devinent qu'àmoitié. Il est, au contraire, facile d'imaginerdes hommes meilleurs que nous; les modèlesabondent sous nos yeux, et le peintre del'idéal trouve dans la réalité tous les élémentsdu tableau qu'il veut tracer. Quand Bulwersuppose que nos descendants seront maîtresd'un agent infiniment plus subtil et plus fortque l'électricité, et qu'ils auront perfectionnél'art de construire des automates jusqu'àpeupler leurs habitations de domestiques enmétal, on est tenté de le trouver bien téméraire.Mais quand il nous montre une sociétéoù la guerre est inconnue, où personne n'estpauvre, ni avide de richesses, ni ambitieux,où l'on ne sait ce que c'est qu'un malfaiteur,nous demeurons tous d'accord que c'est làune société parfaite. Malheureusement l'auteurne prouve pas que les merveilleuxprogrès scientifiques qu'il est permis d'espérerdoivent avoir pou

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