LA PRÉSENTE ÉDITION
DES
ŒUVRES COMPLÈTES DE GUY DE MAUPASSANT
A ÉTÉ TIRÉE
PAR L’IMPRIMERIE NATIONALE
EN VERTU D’UNE AUTORISATION
DE M. LE GARDE DES SCEAUX
EN DATE DU 30 JANVIER 1902.
IL A ÉTÉ TIRÉ À PART
100 EXEMPLAIRES SUR PAPIER DE LUXE
SAVOIR:
60 exemplaires (1 à 60) sur japon ancien.
20 exemplaires (61 à 80) sur japon impérial.
20 exemplaires (81 à 100) sur chine.
Le texte de ce volume
est conforme à celui de l’édition originale:
Clair de Lune.
Paris, 1 vol. gr. in-8o ill., Ed. Monnier, éditeur, 1884,
et Ollendorff, Paris, 1888,
avec addition de:
L’Enfant, En Voyage, Le Bûcher (inédits).
ŒUVRES COMPLÈTES
DE
GUY DE MAUPASSANT
CLAIR DE LUNE
L’ENFANT—EN VOYAGE
LE BÛCHER
PARIS
LOUIS CONARD, LIBRAIRE-ÉDITEUR
17, BOULEVARD DE LA MADELEINE, 17
MDCCCCVIII
Tous droits réservés.
Il portait bien son nom de bataille, l’abbé Marignan. C’était un grandprêtre maigre, fanatique, d’âme toujours exaltée, mais droite. Toutesses croyances étaient fixes, sans jamais d’oscillations. Il s’imaginaitsincèrement connaître son Dieu, pénétrer ses desseins, ses volontés,ses intentions.
Quand il se promenait à grands pas dans l’allée de son petit presbytèrede campagne, quelquefois une interrogation se dressait dans son esprit:«Pourquoi Dieu a-t-il fait cela?» Et il cherchait obstinément, prenanten sa pensée la place de Dieu, et il trouvait presque toujours.Ce n’est pas lui qui eût murmuré dans un élan de pieuse humilité:«Seigneur, vos desseins sont impénétrables!» Il se disait: «Je suis leserviteur de Dieu, je dois connaître 4 ses raisons d’agir, et lesdeviner si je ne les connais pas.»
Tout lui paraissait créé dans la nature avec une logique absolue etadmirable. Les «Pourquoi» et les «Parce que» se balançaient toujours.Les aurores étaient faites pour rendre joyeux les réveils, les jourspour mûrir les moissons, les pluies pour les arroser, les soirs pourpréparer au sommeil et les nuits sombres pour dormir.
Les quatre saisons correspondaient parfaitement à tous les besoins del’agriculture; et jamais le soupçon n’aurait pu venir au prêtre quela nature n’a point d’intentions et que tout ce qui vit s’est plié,au contraire, aux dures nécessités des époques, des climats et de lamatière.
Mais il haïssait la femme, il la haïssait inconsciemment, et laméprisait par instinct. Il répétait souvent la parole du Christ:«Femme, qu’y a-t-il de commun entre vous et moi?» et il ajoutait: «Ondisait que Dieu lui-même se sentait méco