PAR
FRANÇOIS LEVAILLANT.
TOME PREMIER.
A PARIS,
Chez J. J. FUCHS, libraire, rue des Mathurins,
hôtel de Cluny.
DE L’IMPRIMERIE DE H. L. PERRONNEAU, RUE DES GRANDS AUGUSTINS.
AN VII de la R. F. (1799).
A J. TEMMINCK,
TRÉSORIER DE LA COMPAGNIE DES INDES,
A AMSTERDAM.
Mon ami,
Je vous adresse mon Ornithologie, comme un foible témoignage de monestime et de ma reconnoissance; si votre vjmodestie s’en trouve offensée, vous pardonnerez au motif bien pur qui adicté mon offre.
Je vous salue,
LEVAILLANT.
J’auroisvoulu me dispenser de faire une préface à cette partiedescriptive de mes voyages, à laquelle les relations que j’ai déjapubliées servent naturellement d’introduction; j’ai toujours craint dedonner à ce que j’ai fait trop d’importance, et ceux qui me connoissentsavent assez quel prix j’attache à cette gloriole littéraire, donttant d’hommes sont entichés aux dépens de leur repos, quelquefoismême de leurs jours. Cependant j’aurois bien quelques confidences àfaire au public, et il seroit un peu long d’aller compter à chacunen particulier, les déplaisirs nombreux qui m’ont assailli depuisle moment où l’on m’a traîné sur cette scène littéraire: il fautdonc qu’en une seule fois j’en dise une partie à tous, et de la mêmemanière; ceux qui auroient désiré des ménagemens particuliers, nedoivent s’en prendre qu’à eux-mêmes d’en avoir manqué à mon égard, etje ne peux avoir deux façons de me plaindre, quand je n’en ai qu’une desentir l’offense.
Pour prix de mon dévouement aux progrès d’une science que je crois êtreencore à son enfance, je n’ai reçu que des outrages, je n’ai éprouvéque des injustices; et l’insulte de ceux qui m’ont trompé porte uncaractère de bassesse et de lâcheté, dont viijnulle histoire privée n’offre d’exemple. Je ne suis pas le premier quiait à se plaindre de l’envie et de la perfidie des hommes; mais jeserai sans doute le dernier, qui, forcé de se taire sur la plus lâcheimposture et le vol le plus manifeste, se voie dans la dure nécessitéde ne pouvoir se plaindre sans honte pour lui-même et sans tache pourcelui qui a cherché aussi publiquement à lui nuire.
Des hommes puissans m’avoient attiré, caressé, flatté. Je ne m’en cachepas, j’avois compté sur leur reconnoissance; les motifs qui sembloientla fonder étoient purs et vrais. Je me plaignois avec raison d’avoirsacrifié ma fortune et ma plus belle jeunesse aux progrès d’une sciencejusqu’alors toute en théorie et que peu d’expérience avoit fondée. Jecontrariois, il est vrai, de brillans romanciers, de longues ét