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SOUVENIRS DE LA DUCHESSE DE DINO

PUBLIÉS PAR SA PETITE-FILLE
LA COMTESSE JEAN DE CASTELLANE

PRÉFACE DE M. ÉTIENNE LAMYde l'Académie Française

PARIS
CALMANN-LEVY, ÉDITEURS

PRÉFACE

Parmi les femmes du XIXe siècle, la plus Européenne peut-être fut cellequi s'appela d'abord princesse Dorothée de Courlande, puis comtesse dePérigord, enfin duchesse de Dino et de Sagan. Courlandaise d'origine,élevée en Allemagne, mariée en France, elle appartint par le sang, parle goût, par le devoir, à trois nations différentes. Dès l'enfance, elleeut à Berlin un renom de petit prodige, mais ces rayons d'aube neprésagent pas toujours l'éclat du jour, et, au début du XIXe siècle, lesréputations nées hors de France semblaient des gloires de province. Àseize ans, elle acquit chez nous droit de cité; son mariage lui donnapour oncle l'arbitre le plus difficile et le plus sûr des élégancesintellectuelles et sociales, le prince de Talleyrand. En 1814, leprince, après avoir étudié sa nièce, voulut se parer d'elle au congrèsde Vienne. En cette ville tous les souverains tinrent quelques moisleurs cours, et non seulement les traités, mais même les modesmondaines, commencèrent les revanches de l'Europe victorieuse contrel'hégémonie française. Talleyrand, ambassadeur de notre défaite, etsoucieux d'effacer son passé révolutionnaire, ne pouvait présenter à lavieille société, qui imposait de nouveau ses principes et sesexclusions, la princesse de Bénévent. Il se tira d'embarras et soumit àune redoutable épreuve sa nièce, en faisant faire par elle les honneursde l'ambassade. Dans cette élite de la politique, de l'aristocratie, del'esprit, de la beauté, tout était splendeur, et grâces, et séductions,mais tout était curiosité, calculs, pièges, nulle imperfection nepouvait échapper à tant d'yeux si pénétrants, et il fallait plaire àtous pour réussir! À ce congrès qui élevait et abaissait souverainementles puissances, celle de la jeune femme fut consacrée. Son succès àVienne accrédita dans la société polie de toute l'Europe cette beautéintelligente, qu'on ne connaissait pas toute en la voyant, qui devenaitplus séductrice quand elle parlait, qui savait écouter et se taire, dontle tact suppléait l'expérience, et qui, même aux côtés d'un telambassadeur, ne fut pas effacée.

Leurs mérites se complétaient et ne se séparèrent plus. Désormais ellepartagea la vie publique où il gouvernait les affaires, et la retraited'où il les épiait. Elle fut non seulement la grande dame qui perpétuaitpour le plus raffiné des grands seigneurs tous les charmes de l'anciennesociété, mais une confidente pour l'intelligence et une collaboratricepour les travaux du politique. Lui mort, l'attache qui la retenait à laFrance fut brisée. Elle y gardait de vraies affections, elle leurréserva quelques visites et des lettres nombreuses, mais rentra commed'exil dans la chère Allemagne de son enfance. Là elle n'avait pas pourennemis les ennemis de M. de Talleyrand et retrouvait les fidèlessympathies des Hohenzollern; là surtout son influence fut visible, sonprestige populaire et, en 1862, sa mort pleurée.

Les grands acteurs de l'existence mondaine sont un peu comme ceux duthéâtre. Avec leurs gestes et le son de leur voix finit la vie de leurgloire, qui bientôt tient toute en leur nom. Le souvenir de madame deDino allait

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