
CONSTANTIN CHRISTOMANOS
—PAGES DE JOURNAL—
IMPRESSIONS, CONVERSATIONS, SOUVENIRS
TRADUCTION DE GABRIEL SYVETON
PORTRAIT DE L’IMPÉRATRICE PAR FERNAND KHNOPFF
PRÉFACE DE MAURICE BARRÈS
QUATRIÈME ÉDITION
PARIS
SOCIÉTÉ DV MERCVRE DE FRANCE
XV, RVE DE L’ÉCHAVDÉ-SAINT-GERMAIN, XV
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MCM
DU MÊME AUTEUR
Chants orphiques (Orphische Lieder, éditions allemandes de 1898et de 1899, épuisées).—Édition française en préparation.
La Dame Grise (Die Graue Frau), dialogues dans le crépuscule,poème dramatique, traduit en français par Jean de Néthy.
IL A ÉTÉ TIRÉ A PART DE CET OUVRAGE:
Cinq exemplaires sur Japon impérial, numérotés de 1 à 5;
Cinq exemplaires sur Chine, numérotés de 6 à 10;
Douze exemplaires sur papier de Hollande, numérotés de 11 à 22.
JUSTIFICATION DU TIRAGE:
Droits de traduction et de reproduction réservés pour tous pays, y compris
la Suède, la Norvège et le Danemark.
Cette impératrice qui, par une fuite continuelle, par son éventailinterposé et par la pratique de la restriction mentale avait pu jusqu’àsa mort cacher le chef-d’œuvre qu’elle s’était elle-même créée, nousallons la contempler, sinon directement, du moins telle qu’elle seréfléchit dans la mémoire d’un jeune poète tout préparé par sontempérament et par les circonstances à ressentir la beauté.
Le docteur Christomanos se souvient que j’ai essayé de décrire uneméthode pour créer et pour gouverner notre sensibilité, et même, nousraconte-t-il, l’impératrice daignait se plaire à ces petits romans dontil lui donnait lecture; il pense à juste titre que son analyse lyriqued’une reine qui ne voulut d’autre royaume que sa vie intérieure, quis’appli{8}qua uniquement à s’épurer et à reculer les bornes de sa rêverie,nous fournira la plus abondante et la plus poétique contribution auCulte du Moi. Mais qui sommes-nous pour toucher à ce magnifique poème oùl’imagination du plus pauvre lecteur amassera d’elle-même un abondant etmagnifique commentaire? La divine Antigone de Sophocle dit à sa sœurIsmène: «Depuis longtemps je suis morte à la vie, je ne peux plus servirque les morts.» C’est une insensée, pense Créon. «Prince, lui répondIsmène, jamais la raison que la nature nous a donnée ne résiste àl’excès du malheur.»